Déclaration de Principe de la FGTB (1945)

1. Émanation directe des forces laborieuses organisées, la FGTB proclame que
l’idéal syndicaliste, visant à la constitution d’une société sans classes et à la
disparition du salariat, s’accomplira par une transformation totale de la société.

2. Née de la lutte des classes, elle tient à souligner l’évolution de celle-ci en une
lutte non moins vigoureuse de l’ensemble des producteurs contre une oligarchie
bancaire et monopoliste, devenue maîtresse souveraine de tout l’appareil de
production.

3. Dans un esprit d’indépendance absolue vis-à-vis des partis politiques et
respectueuse de toutes les opinions, tant politiques que philosophiques, elle
affirme vouloir réaliser ses buts par ses propres moyens et en faisant appel à
l’action de tous les salariés et appointés en particulier et de toute la population en
général, les intérêts tant moraux que matériels de la très grande majorité de celle-ci
étant identiques ou parallèles à ceux des ouvriers, employés et techniciens.

4. Le mouvement syndical acceptera le concours du ou des partis qui joindront
leur action à la sienne pour la réalisation de ses objectifs sans se considérer
obligé à leur égard et sans qu’ils puissent s’immiscer dans la conduite de l’action
syndicale.

5. Le mouvement syndical veut réaliser un véritable régime de justice sociale visant
à situer chacun à sa place dans la société. Pour assurer à chacun, en fonction
de son travail et de ses besoins, la part de richesses qui lui revient, il déclare
qu’il est indispensable de compléter la démocratie politique par une démocratie
économique et sociale.
A cet effet, il entend que le travail, créateur de toutes les valeurs et source de
tous les biens, soit enfin considéré comme facteur primordial, les autres facteurs
n’étant que subordonnés ou parasites.

6. Ses origines, son caractère et les permanences de son idéal, le désignent pour
être l’élément moteur principal de cette révolution constructive.

7. Dans un esprit de justice, il répudie formellement les fausses valeurs, comme
les droits de naissance et d’argent, consacrées par le régime capitaliste. De
l’exploité, réduit à vendre sa force de travail, il veut faire un libre participant à
l’oeuvre commune de production.

8. Il s’attachera dès lors, selon ses conceptions à amener la création d’organismes
dont le but final doit être de donner aux forces de travail la gestion de l’économie
transformée au bénéfice de la collectivité.

9. Le syndicalisme n’entend pas supplanter les partis dans leur action politique.
C’est en leur qualité de producteur qu’il fait appel aux travailleurs, car c’est de
leur condition économique que dépendront leurs perspectives de développement
social, intellectuel et culturel.

10. Pour mener à bien cette tâche émancipatrice, il ne doit avoir à subir aucune
contrainte, c’est pourquoi il se refuse à son intégration à quelque degré que ce
soit, dans un quelconque système corporatif.

11. Le syndicalisme accepte l’idée de nation et, dans le cadre d’une démocratie
politique, économique et sociale, il prendra ses responsabilités, en vue du
maintien et du renforcement de la démocratie.

12. Il estime que la socialisation des grands trusts bancaires et industriels s’impose et
qu’il convient également d’organiser, diriger et contrôler le commerce extérieur.

13. Rejetant l’idée de la gestion étatique ou bureaucratique, il entend que la gestion
des entreprises nationalisées soit confiée aux travailleurs (techniciens, employés
et ouvriers) et aux consommateurs, préalablement organisés au sein de Conseils
de direction et de coordination de l’économie nationale.

14. Le mouvement syndical belge poursuivra la réalisation de ses buts et objectifs
en collaboration avec les organismes syndicaux internationaux se réclamant de
la démocratie.

15. Afin de libérer le travailleur de la crainte sociale et de lui donner la garantie qu’en
échange de son labeur, il sera prémuni contre les fléaux et les maux résultant
de sa condition, le mouvement syndical défend non seulement les réformes de
structure et la transformation de la société capitaliste mais aussi les revendications
immédiates des travailleurs.
Conscient de la grandeur de sa mission humanitaire, le syndicalisme se déclare
apte à mener à bien ces tâches multiples, car il forme par le bloc indivisible des
forces du travail, l’un des éléments de base de la société de demain.